Éloge de la patience à la française
Ils attendent partout, les Parisiens, à la boulangerie, à la SNCF, au musée, au cinéma, aux caisses de grands magasins et restent stoïques ou, devrait-on dire, fatalistes, désabusés, soumis….
C’est en faisant la queue avec eux en attendant de payer, de commander ou d’entrer dans un lieu public qu’on mesure à la fois leur patience et l’énorme différence de population entre la France et un pays comme le Canada. Pour faire ses courses avant le souper, ne faites pas comme moi, optez pour un seul magasin, style Monoprix, sinon armez-vous de la même patiencequ’eux… Pour une simple baguette, comptez dix minutes d’attente et autant pour passer à la caisse du poissonnier, puis a celle du marchand de fruits et légumes pour aboutir finalement dans une supérette de quartier, vu qu’il vous manquera bien encore comme moi quelques bricoles… Avec dix nouvelles minutes d’attente à la caisse express… Imaginez au marché du dimanche, quand les Parisiens vont faire leurs emplettes de bouche en passant d’étal à étal !
Au musée, même éloge de la patience… Début janvier, à l’expo Hopper au Grand Palais, même les gens munis de billets achetés à l’avance faisaient la file pendant plus d’une heure sous la pluie avant de pouvoir pénétrer dans le bâtiment. Puis, il y avait queue au vestiaire (obligatoire), comme aux toilettes et à la cafétéria… Sans compter la file continue pour visiter l’exposition elle-même et celle pour reprendre son manteau a la sortie. Ouf !
La semaine dernière, je visitais l’exposition Chagall au Musée du Luxembourg. Surprise: pas de file pour les gens avec billets et moins d’une heure d’attente pour les autres; aucune aux toilettes mais à la boutique, j’ai assisté à une scène cocasse. Trois personnes étaient derrière les caisses mais une seule s’occupait des visiteurs ayant acheté catalogues ou autres produits dérivés de l’exposition. Les deux autres vaquaient à des occupations annexes dans leurs ordinateurs sans lever le nez sur la foule grossissante en attente de passer à la caisse. La file occupait plus de la moitié de la boutique quand mon tour vint enfin à la seule caisse ouverte.
Pendant les quinze bonnes minutes passées là, la caissière ne s’est pas départie de son flegme, ne montrant aucun signe d’une quelconque volonté de tenir compte de la situation pour accélérer le mouvement, non plus que pour réclamer l’aide de ses collègues. Et pendant ce temps-là, les clients faisaient sagement la queue, sans aucun signe d’énervement. Une leçon de patience, dis-je…